Pour aborder la technologie, j’ai choisi de partir de la captation vers la restitution : du microphone au haut-parleur.

3.1 Les microphones

3.1.1 Principe
C’est le capteur qui permet de convertir un signal acoustique en signal électrique.

Il existe de nombreux types de microphones de par leurs caractéristiques mécaniques, électroniques et acoustiques.

3.1.2 Classification électrique et mécanique
On étudie les microphones selon le principe de conversion du signal acoustique et signal électrique.

3.1.2.1 Microphones électrodynamiques

3.1.2.1.1 principe
L’induction est un phénomène qui fait qu’un matériau conducteur en mouvement dans un champ magnétique va être parcouru par un courant électrique induit.
C’est le même principe que la dynamo en quelque sorte.

3.1.2.1.2 à bobine mobile
Ici on utilise une membrane très légère sur laquelle on a fixé une bobine de fil métallique très fin. Si la bobine ou la membrane sont trop lourdes l’inertie du système sera telle que les petites vibrations ne pourront pas mettre en mouvement la membrane. La bobine est placée dans l’entrefer d’un aimant cylindrique.
Lorsque la membrane vibre, la bobine se déplace dans le champ magnétique créé par l’aimant. Il apparaît ainsi un courant induit. La différence de potentiel aux bornes de la bobine est le signal électrique audio.

En règle générale, les niveaux de sortie de ces microphones sont faibles et entraînent un souffle important. En contrepartie, ces microphones sont capables de travailler avec de très fortes pressions acoustiques. La distorsion est relativement bonne comparée aux autres types de microphones.
Ces microphones sont robustes et peu sensibles à l’humidité.
Les microphones de ce type sont très communs. On trouve classiquement des polarités omnidirectionnels et directionnels (cardioïdes et hypercardioïdes)
Par l’ajout d’une seconde bobine non-mobile et hors du champ de l’aimant, on peut en la mettant hors phase par rapport à la bobine mobile réduire très fortement les parasites électromagnétiques.

3.1.2.1.3 à ruban
Un petit morceau d’aluminium plié en accordéon est suspendu dans l’entrefer d’un aimant en fer à cheval.
On prélève la différence de potentiel de part et d’autre du ruban d’aluminium.

Ce type de microphone est plus sensible que le microphone à bobine mobile, mais aussi beaucoup plus fragile. Il suffit de souffler sur la membrane pour l’abîmer de façon irréversible.
Un transformateur d’adaptation d’impédance est nécessaire.
Ces microphones ont été très communs avant l’apparition des microphones électrostatiques. On les a beaucoup trouvé pour l’enregistrement et la radiodiffusion de la voix.
La polarité classique de ces microphones est bidirectionnelle de part la symétrie entre l’avant et l’arrière. On trouve aussi quelques microphones hypercardioïdes.

3.1.2.2 Microphones électrostatiques

3.1.2.2.1 principe
On crée un champ électrique entre une membrane métallisée et une ou plusieurs armatures fixes : on réalise un condensateur.
La membrane, en se déplaçant, fait varier la distance entre les deux plaques du condensateur. Le champ électrique varie en fonction du carré de la distance, la mesure de ce champ électrique donne le signal électrique audio.
Ces microphones sont bien plus sensibles que les microphones électrodynamiques, la distorsion est plus faible, le rapport signal-bruit est amélioré. En revanche, les niveaux admissibles sont inférieurs et dans l’ensemble il y a des problèmes de fuites dans les condensateurs liés à l’humidité.

Il existe trois types de mise en oeuvre :

3.1.2.2.2 à électret
On utilise une matière plastique, appelée "electret", qui a la propriété d’avoir été chargé électriquement à la fabrication.
On prélève le champ électrique entre cette plaque fixe et la membrane "electret".
L’avantage est au niveau de l’électronique embarquée dans le microphone puisqu’il n’est pas nécessaire de créer une tension de polarisation dans la capsule.
Une alimentation est toutefois nécessaire pour les étages de préamplification du signal à la sortie de la capsule.
Ce type de microphone permet de réduire les dimensions de la capsule : "microphones cravates".
Beaucoup de microphones de moyenne gamme et quelques modèles haut de gamme sont conçus selon ce concept.
Toutes les directivités sont disponibles pour ce type de microphone.

3.1.2.2.3 à condensateur asymétrique et polarisation continue
Ici, il s’agit d’une polarisation non permanente. Dans l’électronique du microphone il y a un convertisseur qui augmente la tension fournie par l’alimentation fantôme pour polariser la membrane (entre 50V et 100V).

On mesure sur une résistance très élevée placée entre les deux plaques du condensateur la variation de la tension liée au déplacement de la membrane.
Le bruit de la capsule est notamment lié aux dimensions de la membrane, plus la surface est petite et plus le rapport signal-bruit est mauvais.
L’électronique est plus complexe que dans le cas de l’electret.
On trouve des microphones très sensibles dans cette catégorie.

Il reste néanmoins des imperfections :
- la tension de polarisation élevée dans des conditions humides crée des problème de fuite entre les deux plaques du condensateur.
- plus gênant à mon avis est un problème de conception plus fondamental :
Le champ électrique varie en fonction du carré de la distance entre les deux plaques. Une vibration qui excite la membrane va engendrer un débattement de part et d’autre de la position de repos. Tantôt la distance entre la membrane et la plaque arrière va être plus grande que la distance au repos, tantôt elle sera plus petite.
Soit D la distance au repos et d l’excursion avant et arrière la membrane si elle est soumise à une fréquence pure.
Quand la membrane est du côté de la plaque arrière la variation du champ électrique est de :

(D-d)²/D²

Quand la membrane est du côté opposé à la plaque arrière la variation du champ électrique est de :

(D+d)²/D²

On voit ici apparaître une non-linéarité qui engendre de la distorsion.

3.1.2.2.4 à condensateur symétrique et polarisation H.F
Pour résoudre à ces problèmes, la société Sennheiser a développé une technologie différente, puisque l’idée principale était d’avoir une capsule symétrique. Il faut donc rajouter une autre armature fixe devant la membrane. On obtient une sorte de condensateur en sandwich.

Si la polarisation n’est plus continue, mais alternative l’impédance de la capsule chute et on peut utiliser des résistances plus faibles pour charger le condensateur. De plus à tension de polarisation constante le niveau de sortie de la capsule augmente avec la fréquence de polarisation. On peut donc augmenter la fréquence de polarisation et baisser la tension de polarisation.
Ceci résout les problèmes de fuites de courant en milieu humide et la distorsion due à la non-symétrie du capteur précédent.

3.1.2.3 Autres technologies

3.1.2.3.1 à céramique piezoélectrique
Un cristal piézoélectrique a la propriété de faire apparaître une différence de potentiel entre ses faces lorsqu’il est soumis à une pression.
On peut utiliser cette propriété pour convertir une onde acoustique solidienne (qui se propage dans un solide et non dans un fluide) en signal électrique.
La qualité n’est pas très bonne en règle générale. La distorsion est élevée, mais on utilise ce capteur pour des applications spéciales, par exemple pour des instruments de musique en captation "de contact", ou s’il y a de fort risque de Larsen, pour faire des hydrophones, etc...
En général, le capteur se présente sous la forme d’un disque de céramique avec une face métallisée déposé sur un disque de laiton. Il suffit de souder un fil sur le disque de laiton et un sur la surface du cristal pour obtenir un capteur.
Un étage de préamplification est nécessaire si on souhaite câbler de grandes longueurs.

3.1.2.2.2 à charbon
C’est un des premiers microphones électriques. Ici il s’agit de faire varier une résistance.
Une membrane conductrice est placée sur un récipient contenant du charbon réduit en poudre. On fait passer un courant entre la membrane et le récipient. Le charbon est conducteur et laisse passer le courant. Lorsque la membrane se déplace, les grains de charbon sont plus ou moins comprimés et font varier la conductivité globale du charbon. Si on alimente avec une intensité constant on fait varier la tension et vice-versa.
La distorsion est très élevée et la sensibilité faible.
Ces microphones on longtemps été utilisé dans les téléphones. Aujourd’hui ce sont des objets de collection.

3.1.2.2.3 le futur...
Il y a de nouvelles technologies en développement. Le but premier semble néanmoins la miniaturisation.
Exemple : le capteur optique.

Il s’agit de suivre à l’aide d’un laser le déplacement d’une membrane réfléchissante. On utilise la réflexion du rayon laser sur la membrane et on en déduit le signal audio. Le déplacement de la membrane dévie plus ou moins le rayon réfléchi et selon la quantité de lumière captée par la cellule photosensible on peut déduire la position de la membrane.

Il existe d’autres technologies en développement :
- Un assemblage de microcapteurs sur un substrat de silicium.
- Des capteurs numériques ou des microphones intégrant des convertisseurs proches de la capsule.

3.1.3 Classification acoustique
Les propriétés fondamentales des microphones sont leur directivité et leur réponse en fréquence. Elles dépendent de la mise en oeuvre des capteurs décrits précédemment.

3.1.3.1 Capteur de pression
C’est le plus simple : une membrane sur un boîtier fermé, à part pour un trou qui sert d’évent pour compenser les variations de la pression atmosphérique. On mesure la différence entre la pression extérieure et une pression interne pratiquement constante.

La directivité théorique de ce capteur est omnidirectionnelle, c’est à dire que quelque soit l’incidence du son par rapport à la capsule, l’intensité sera la même.
En pratique, la taille de la capsule et du corps du microphone font qu’il y a une directivité de plus en plus marquée au fur et à mesure que la fréquence augmente.

La réponse est étendue dans les graves. Par contre plus on s’éloigne de la source et plus les aigus chutent. Pour remédier à cela certaines capsules ont "une bosse de présence".

Les capteurs de pression ont des membranes plus tendues que les autres capteurs, on peut les conseiller s’il fait un vent fort et que la directivité relativement large dans les médiums et graves n’est pas un problème.

3.1.3.2 Capteur de gradient de pression
Un autre cas simple, ici la membrane est fixée sur un anneau et c’est la différence de pression entre les deux faces de la membrane qui la fait dévier.
La polaire théorique est en forme de huit. Les sons provenant latéralement (dans le plan de la membrane) agissent de façon égale sur les deux faces et ne sont pas captés. La sons provenant d’une source placée dans l’axe du microphone sont captés avec le plus de sensibilité.

En pratique les polaires sont très proches de la théorie.

Les lobes de la polaire sont hors-phase l’un par rapport à l’autre. On repère l’avant comme étant le côté de la membrane où les surpressions créent des tensions positives.

La réponse dans les grave est limitée, on a classiquement
-6dB vers 40Hz.
En revanche, plus le microphone est proche de la source et moins le régime d’ondes planes, sur lequel la conception du microphone est basé, est juste. Il faut revenir au cas des ondes sphériques. Seulement entre l’avant et l’arrière de la membrane l’intensité du son varie par le trajet rajouté d’où une accentuation des fréquences à grande longueur d’onde. On appelle ce phénomène l’effet de proximité. Il suffit d’atténuer les graves avec un filtre pour régler ce problème. Mais si il y a des sources plus éloignées qui sont captées en plus de sources proches il y aura une différence de tessiture artificielle.

La membrane des capteurs de gradient de pression est souple et est donc très sensible au vent. Une bonne protection contre le vent est nécessaire pour créer un espace non turbulent autour de la capsule.
Selon la force du vent, on choisira la protection adaptée. Une protection trop forte nuira inutilement aux hautes-fréquences.
Dans l’ordre d’efficacité, mais aussi d’atténuation dans les aigus :
- Mousse,
- Cage avec voile en tissu,
- Cage + jersey,
- Cage + fourrure.

3.1.3.3 Labyrinthe acoustique
Si on ajoute petit à petit une polaire bidirectionnelle à une polaire omnidirectionnelle on obtient une continuum de polaires de plus en plus directives.

Il faut se souvenir qu’un des lobes de la polaire bidirectionnelle est en opposition de phase. C’est pourquoi on a progressivement un côté de la polaire omnidirectionnel qui disparaît. Remarque : on normalise les polaires par rapport à leur maximum de sensibilité.
En pratique pour avoir un peu de capteur de gradient de pression et un peu de capteur de pression dans la même capsule on crée à l’arrière de la membrane un labyrinthe acoustique qui retarde sélectivement les sons en fonction de leur angle d’incidence et de leur fréquence.

On peut ainsi fabriquer de nombreux microphones.
Les polaires les plus régulières et qui sont les plus proches du modèle théorique sont les cardioïdes.

L’effet de proximité est toujours présent pour ces microphones de polarité intermédiaire.

3.1.3.4 Capteur à directivité variable
Les capteurs décrits précédemment sont à une seule polarité. Il peut être intéressant d’avoir une capsule capable de nous donner plusieurs directivités, voire même toutes les directivités possibles dans le continuum.
Deux mises en oeuvre sont possibles.

3.1.3.4.1 système modulaire à capsules interchangeables
C’est l’approche la plus élémentaire. On change la capsule en gardant la même électronique. Ca marche toujours et il n’y a pas de doute à avoir, chaque capsule à une directivité rigoureuse. Il n’y a pas de compromis pour avoir plusieurs directivités sur la même capsule. Il existe de nombreux ensembles de ce genre.

3.1.3.4.2 à simple membrane
Assez rare, une seule membrane, mais un labyrinthe avec des ouïes que l’on peut ouvrir et fermer mécaniquement par des volets pour modifier la directivité. Les directivités intermédiaires ne sont pas possibles.
De telles capsules existent par exemple chez Schoeps

3.1.3.4.3 à double membrane
Ici on associe deux capteurs. On pourrait d’après ce qui a été décrit au 4.1.3.3 combiner dans le même microphone une capsule bidirectionnelle et une capsule omnidirectionnelle. C’est de cette façon qu’on obtenait des capsules cardioïdes avant de savoir les concevoir avec des labyrinthes acoustiques. Mais la polaire d’une capsule omnidirectionnelle est loin du modèle théorique. On a donc recours à deux capsules cardioïdes dos à dos et on mélange les signaux pour faire varier la directivité.
On trouve ce type de capsule chez Neumann et Sennheiser par exemple.

3.1.3.5 Autres systèmes

3.1.3.5.1 tube à diffraction / "canon"
Le tube a diffraction fonctionne sur le principe de la mise hors phase des sons ayant une incidence plus ou moins écartée de l’axe avant du microphone.

C’est un capteur de type hypercardioïde avec un long tube percé de trous sur les côtés.
Ces microphones sont parmi les plus directif, mais il existe de nombreux artefacts acoustiques et on voit apparaître plein de petits lobes sur les côtés; Le tube à diffraction ne fonctionne que pour des fréquences de longueur d’onde courtes et moyennes. La polaire dans les graves est de type hypercardioïde.

3.1.3.5.2 parabole
Les paraboles acoustiques exploitent une propriété géométrique de ces courbes. Des droites provenant de l’infini arrivant parallèles à l’axe de la paraboles sont toutes renvoyée en passant par le foyer de la parabole.

Pour des sources lointaines, on peut considérer être en régime d’ondes planes, la propagation se fait de façon perpendiculaire au front d’onde. Si on oriente une parabole avec un microphone cardioïde (pour limiter la captation directe de la source qui peut donner des filtres en peigne en se mélangeant avec l’onde réfléchie) la pression acoustique au foyer sera proportionnellement plus élevée que la surface de la parabole sera grande.
Pour faire varier la directivité, il suffit d’avancer plus ou moins le microphone par rapport au foyer.

Ce type de microphone se rencontre beaucoup sur les bandes de touche des stades avec des opérateurs qui suivent l’action. On en trouve aussi en prise de son pour des documentaires animaliers quand il faut maintenir une certaine distance avec le sujet.

3.1.3.5.3 microphone à zone de pression (P.Z.M)
Une autre propriété est utilisée ici. On considère une surface de grande dimensions par rapport à celles du capteur. Si on mesure la pression acoustique au niveau de la surface on constate un doublement. Si on place un microphone juste au niveau de la surface on obtiendra un signal deux fois plus fort que si il n’y avait pas cette paroi.

Ce genre de microphone trouve pour applications la prise de son lors de conférences (placé discrètement sur les tables) ou sur de la captation musicale, en particulier pour le piano ou on le fixe sous le couvercle de l’instrument. Il peut aussi servir pour les batteries.

* * *

Les microphones sont sans doute la partie la plus critique dans la chaîne audio, puisque si la captation est de mauvaise qualité tous les efforts suivants auront beaucoup de mal à rattraper les dégâts.

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